C’était hier…ou avant-hier…il y a très longtemps surement, car Elle n’a pas d’âge…
A l’époque de sa naissance, son pays
était si plat, si aride, si pauvre et désertique que personne n’aurait parié
sur une renaissance. Il faut avouer que les guerres, les disettes, les fléaux
l’avait laissé exsangue.
Sa famille végétait dans une sorte de
trou à rat immonde et sordide, sans avenir, sans espoir, sans désirs, sans même
imaginer qu’on puisse s’en sortir. Un travail sans espoir était leur futur.
Or un jour, lequel ne me le demandez
pas, il vint à passer au village un personnage pittoresque et hilarant qui a
force de blagues et de pirouettes a ramené un sourire sur leurs lèvres et un
pétillement dans leur regard d’habitude si morne. Beau parleur il leur a donné
à voir des merveilles sorties de son chapeau. L’imaginaire du village s’est
enflammé, tous ont eu envie de sortir de leur quotidien, de respirer, de
s’ouvrir à un autre monde, d’acquérir toutes ces richesses, de se faire plaisir,
de vivre sans compter. Son slogan était « dépensez et profitez ! » Elle fut la plus ensorcelée ! Elle le suivait comme une ombre des espoirs
plein les yeux.
Mais…l’Homme les ayant bien appâtés,
ayant fait briller tant de beauté cachée voulu repartir, sa publicité était
faite, plus jamais le village ne serait serein, chacun rêvait d’acquérir du
tout ou du rien… le besoin de dépenser était là. Le village entier voulut le retenir, se demandant comment le garder parmi eux ?
L’Homme qui était illusionniste…
spécialiste du vent… leur proposa de leur offrir une nouvelle vie d’aisance
contre le reste de leur existence qu’il viendrait chercher quand bon lui semblerait.
Ce pays triste et pauvre était très
religieux, pétri de sorcellerie, chacun avait son amulette, les chamanes y étaient
pléthore, la peur de la mort omniprésente. Leur peur de Dieu ou diable était
pétrie de superstition. Tous se récrièrent donc…sauf Elle.
Échanger cet endroit exécré et cette
famille sans le sou ? Oui ! Oui ! Oui ! Après tout elle était
jeune sa vie serait longue, que risquait-elle ? Elle suivit l’Homme comme
les rats avaient suivi le joueur de flûte, ensorcelée de tant de choses
promises.
Au début, tout fut parfait : le
luxe, l’abondance, l’oisiveté, tous ses désirs réalisés, tout effort épargné.
Les voyages, les maisons, les voitures, les vêtements…
Malheureusement, l’Homme était omniprésent, comme une
ombre ses pas suivaient les siens, même seule elle savait sa présence. Il
l’épiait, la scrutait, savait le moindre de ses gestes, de ses besoins. Ses tentations ne la laissaient pas en paix.
Elle était dans une cage dorée, tout le matériel lui
était donné en abondance, mais sans amie, sans parents, son existence était
vide. L’Homme lui avait retiré l’essentiel, les rêves, les envies, les désirs,
les fantasmes, son cœur ne battait plus pour la joie, l’amour et tout ce qui
fait de l’existence une fête.
Elle se mit alors à regretter son plat pays, la
promiscuité de ses frères et sœurs, ses parents, son village, la chaleur des
siens, la simplicité des soirs autour du feu de cheminée... et même le labeur
harassant du travail de la terre, lui parut être un paradis de joies simples,
de convivialité et d’entraide. Elle dépérissait…Elle ne rêvait plus sa vie bien
que de loin sa vie fut un rêve !
L’Homme attendait...elle comprenait
enfin qu’il lui avait offert une illusion…qu’elle avait échangé sa vie contre
du vent…et le vent l'emportait ! Anne.
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