La porte de notre appartement
était entrebâillée, je suis entré et le silence m’a enseveli. Personne ?
Notre foldingot de chien ne bondit pas sur moi, pas de musique se déversant à
flots du premier étage d’où mes deux garnements se font quotidiennement une
joie de m’initier à la douceur veloutée du rap ! Bizarre…
Il
flotte bien dans l’air de délicieuses odeurs annonciatrices d’un de ces repas
pantagruéliques et hypercaloriques que ma chère et tendre adore me concocter, mais
aucun bruit de casseroles bousculées ne me parvient, le ronron du robot ménager
perpétuellement en action manque à l’appel lui aussi…
Diable,
où sont-ils donc passés ?
J’ose
un appel timide dans ce vide sonore : « Ohé » puis, plus fort,
je tente d’avertir de ma présence ma famille étrangement invisible !
Silence, silence, silence…
Et
là je commence à douter, à flipper même. Je suis comme cloué sur le pas de la
porte et, en une fraction de seconde, je revisite tous les faits divers récents
des journaux « catastrophe » ! Horreur ! Un cambrioleur est
entré et les a neutralisés, voire pire ! Ou ils ont été pris en otage au
supermarché, ou alors ils ont renversé un cycliste sur le chemin du retour et
sont interrogés par la police !
Je
tremble, je n’ai même pas posé ma sacoche, je transpire et d’un pas mécanique
je me dirige vers le salon, tout aussi silencieux. Portes fermées, c’est pire que
ce que je pensais ! Dans un geste qui en d’autres moments aurait été jugé
un peu trop théâtral, je pousse violemment les portes vitrées et là… là…
Une
immense clameur m’accueille, vingt paires d’yeux me sourient, chacun se met à
applaudir, les corps s’animent, la chaleur revient à mon visage et mon aimée se
précipite vers moi pour me murmurer à l’oreille : « Bon anniversaire
mon amour ! ».