Conte
pour enfants
Brésil
et la chenille Caroline
Il était, dans un
temps indéfini, un village composé d’igloos magnifiques, de grands igloos tout
blancs. A l’intérieur des tapis, des coupes en or, des vases en argent, des
meubles en glace faisaient penser à un conte des mille et une nuits. On aurait
dit l’Afrique transposée au pôle nord.
Dans cette contrée tous
les animaux se côtoyaient, les ours blancs étaient les amis des girafes aux
longs cous, les loups transportaient les écureuils sur leurs dos, les
crocodiles nageaient avec les enfants dénudés.
Seul un petit garçon, à
l’écart, portait un anorak, car certains préféraient le chaud et d’autres le
froid ; et chacun avait le choix de la température. Il s’appelait Brésil,
du nom d’un pays disparu.
Un matin, il sortit de
son igloo, vêtu toujours de son anorak et se dirigea vers la rivière dorée où
coulait de l’or fondu. Il suivit la rive en sautant à cloche-pied. De temps en
temps, il se laissait tomber dans l’herbe haute où les fourmis cheminaient en
dansant.
Tout à coup, il aperçut une
chenille rouge qui se dandinait et qui lui adressa la parole, étonnant même
dans cette contrée :
-Hé-ho !
Toi qui vas vite, pourrais- tu me conduire chez mes parents ? Ma mère est
très malade et je ne peux arriver rapidement près d’elle.
Brésil, qui trouvait la
chenille sympathique, la posa dans sa main pour l’amener à bon port.
-
Comment t’appelles-tu et où habitent tes parents ? demanda-t-il.
-
Mon nom est Caroline et je vais te conduire.
Bon an, mal an, ils
cheminèrent à travers la prairie. Soudain, la chenille tomba de la main de
l’enfant et se mit à se tortiller.
-Je
suis tombée sur un chardon et je vais me transformer en vilaine bête à deux
têtes.
Sous
les yeux ébahis de Brésil, Caroline devint un monstre horrible.
Il se mit à courir pour
lui échapper, mais elle était devenue plus grande et plus rapide que lui. Elle parvint
à ses côtés.
Maintenant, dit-elle, je
ne sais plus où sont mes parents, j’ai perdu la mémoire mais je crois me
souvenir qu’ils habitent à côté de la cascade. Vont-ils me reconnaitre ?
L’enfant
était bien ennuyé. Comment remplir sa mission en pareille compagnie ?
Il essaya d’écouter le
fracas de l’eau, il tourna dans tous les sens puis vit un aigle immense qui
planait vers un rocher. Il doit aller boire, pensa-t-il et il se dirigea vers
le lieu où l’oiseau avait disparu, suivi de l’horrible Caroline.
Là, un spectacle
merveilleux l’attendait : L’eau, chargée d’or, qui sautait de pierre en
pierre, formait un rideau miroitant au soleil.
-
Il me semble que mes parents habitent derrière la cascade, dit le monstre.
Derrière
la cascade ? Mais comment la franchir ?
L’aigle qui se
désaltérait entendant ces paroles proposa son aide :
-
Si tu veux, je peux te porter tout là-haut où tu trouveras un chemin pour
passer derrière la cascade. Il y a un tunnel à descendre pour rejoindre une
grande salle.
-
D’accord, mais Caroline ne pourra pas me suivre. Je vais la laisser ici.
L’oiseau survola Brésil qui
parvint à s’accrocher à ses pattes. Il put admirer ainsi le paysage. Il vit, au
loin, son village d’igloos scintillants et trouva qu’il s’était beaucoup
éloigné. Une angoisse le saisit :
-
Quand Caroline sera près de ses parents, comment pourrai –je retrouver les miens ?
Il n’eut pas le temps
de réfléchir davantage car il venait d’atterrir sur un rocher pointu qui lui
transperça la cheville. L’aigle s’éloignait déjà. Brésil se retrouvait tout
seul, loin de tout.
Heureusement que dans son
pays les plaies se cicatrisaient toutes seules. Il n’eut donc pas mal et put se
remettre en route à la recherche du tunnel.
Il
le trouva, enfoui derrière quelques branches d’un arbre violet.
Il commença à descendre
lentement pour ne pas glisser dans les flaques d’or. L’obscurité ne lui faisait
pas peur mais de grosses chauves-souris le frôlaient en riant et il devait se
faire tout petit à chaque fois.
Enfin il arriva dans la salle tant
attendue. Elle était immense comme une cathédrale, remplie de stalactites d’or
et d’argent. De grandes feuilles souples couvraient le sol et, sur l’une
d’elle, il vit deux chenilles rouges, une qui grignotait et l’autre qui
dormait.
-
Etes-vous les parents de Caroline ?
-
Oui, oui, répondit la plus grosse. Ma femme est
malade et elle attend sa fille avec impatience.
Comment leur expliquer que leur jolie chenille s’était transformée en
horrible bestiole ? Il se mit à pleurer. Il était épuisé, affolé par cette
aventure qui le dépassait. Il commença à appeler ses parents mais personne ne
pouvait l’entendre derrière cette cascade.
Le
père chenille réfléchissait sur sa feuille. Seul, le sanglot de Brésil
troublait les pensées de chacun.
Soudain, l’enfant sentit une présence près de lui. Il se retourna pour
se trouver nez à nez avec le chat Kouki qui lui murmura : « Ne crains
rien, je suis là, je t’ai suivi depuis ton départ de l’igloo mais il a fallu
que je grimpe le long de la cascade avec Caroline, c’est pourquoi je n’arrive
que maintenant »
Brésil ne s’étonnait plus d’entendre un animal parler.
-
Caroline est ici ? mais que vont dire ses
parents ?
Le papa chenille avait entendu ces paroles.
-
Caroline ? Ma fille ?
-
Oui, mais elle est maintenant transformée en monstre à deux têtes.
-
Alors elle n’a pas écouté mes conseils. Elle a
voulu quitter la grotte pour chercher de l’aide parce que sa maman était malade,
mais il ne fallait surtout pas qu’elle tombe sur un chardon.
Heureusement
vous l’avez ramenée et les grosses feuilles de la grotte vont servir d’antidote
et la guérir.
Mets-toi
à table, ma fille.
Caroline sortit doucement d’un
recoin et se jeta sur sa nourriture habituelle.
-
Les enfants font leurs propres expériences, dit
philosophiquement le papa. Il serait temps que vous repartiez chez vous avant
la nuit. La maman de Caroline va s’endormir doucement près de sa famille. Il ne
faut pas être triste, elle a vécu une longue vie heureuse et elle a besoin de
ce grand repos éternel.
Après avoir dit « Au revoir »
Brésil et Kouki repartirent chez eux, chacun réfléchissant de son côté à cette
grande aventure. Josy